vendredi 5 décembre 2008

Un anniversaire négligé

La date semble presque oubliée comme si son évocation gênait. Le 9 décembre 1948, à la veille de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, l’Assemblée générale des Nations unies adoptait la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.
Le mot désignant le « crime parmi les crimes », la volonté d’exterminer un peuple ou une nation, avait été créé par Raphael Lemkin, un juriste juif polonais qui avait perdu 40 membres de sa famille dans l’Holocauste. Sa volonté de « nommer » ce crime de lèse-humanité était née bien plus tôt, lorsque, encore adolescent, il avait pris connaissance des atrocités perpétrées par les autorités ottomanes contre la communauté arménienne d’Anatolie. Près d’un million de personnes avaient été massacrées. Malgré l’indignation de diplomates, de missionnaires et de journalistes européens et américains qui assistèrent, impuissants, à l’extermination d’un peuple, et qui plaidèrent en vain pour l’intervention des armées occidentales.
Qui se souvient encore du massacre des Arméniens ?, se serait exclamé Hitler, lorsqu’il mit en œuvre la Shoah, la destruction des Juifs d’Europe.

Passivité
La date semble gêner, disais-je en début d’article. Oui, elle gêne parce que l’histoire de la Convention est celle de son non-respect. Confrontée à la réalité du génocide, la communauté internationale a couvert ses oreilles et détourné les yeux. Depuis 1948, des millions de personnes, membres de communautés désignées comme cibles par des gouvernements assassins, sont mortes au su et parfois au vu de tous. Biafra, Cambodge, Bosnie, Rwanda, Darfour: des massacres de masse se sont déroulés alors que les grands dirigeants du monde promettaient : « plus jamais ça ».
Aujourd’hui, alors que des populations civiles sont massacrées, que des femmes sont violées dans le cadre d’une politique de destruction collective, du Darfour à l’Est du Congo, la célébration de la Convention mériterait davantage qu’une simple mention avant que ne s’ouvrent les cérémonies d’anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.