Les images du président soudanais dansant devant ses supporters à Khartoum et El-Fasher (Darfour) sont un sommet d’indécence. Inculpé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale, le chef de l’Etat soudanais a eu recours à l’arme classique des satrapes et des tueurs : le nationalisme, la dénonciation des comploteurs étrangers, la stigmatisation de l’Occident. Et la plupart des pays africains ou arabo-musulmans ont choisi de le rejoindre dans sa sarabande macabre.
Dès l’instant où l’accusateur est dénoncé comme un blanc (alors que la CPI est une institution des Nations unies), la victime n’a plus droit à aucun égard. Une partie de l’Afrique officielle défend ainsi le droit des Etats à massacrer, réprimer, violer leurs peuples. Heureusement, quelques illustres Africains ont élevé la voix, et parmi eux, Mgr Desmond Tutu, qui a qualifié l’attitude de l’Union africaine de « honteuse ».
Le mandat d’arrêt était justifié par les crimes commis au Darfour. Il l’est confirmé par la riposte que lui a opposée le régime soudanais. Non seulement, le président Béchir a mené une brutale campagne de contre-insurrection qui a coûté la vie à des dizaines de milliers de civils (300.000 selon les Nations unies), mais en expulsant les organisations humanitaires, il a pris son peuple en otage. Et il a trouvé des alliés au sein de dizaines d’Etats prêts à dégrader leur souveraineté nationale en réclamant l’immunité pour l’inhumanité.
.Au delà de ces événements, la communauté internationale devrait aborder de front les doutes et les accusations qui se sont croisés au cours de ce pitoyable épisode. Le fait que la CPI se soit jusqu’ici intéressée à des chefs d’Etat africains pose un réel problème, d’autant plus que certaines diplomaties occidentales protègent leurs ressortissants et ceux de leurs pays amis. La justice doit non seulement être impartiale, mais elle doit aussi paraître impartiale.
Les rapports entre les organisations de la société civile doivent également être clarifiés. A la tension entre les ONG de paix ou de médiation de conflit et les associations de défense des droits de l’homme s’est ajoutée cette fois la rancœur des groupes humanitaires et médicaux, accusés par Khartoum d’avoir informé la CPI.
Les malentendus se sont accumulés ces dernières années entre ces différentes organisations, en grande partie parce que leurs mandats sont différents et parfois même concurrents. En partie aussi parce que les membres de ces groupes sont convaincus de la primauté de leur mandat et de la plus grande justesse de leur cause.
Les conflits auxquels doivent faire face les ONG sont de plus en plus complexes. Les prétentions de représenter des valeurs intangibles s’entrechoquent. Il est temps de mettre autour de la table toutes ces organisations dont l’action est le plus souvent admirable et l’engagement incontestable.
Atlantic notes (1)
Il y a 7 ans